Le "dressage du chien de berger" est un ouvrage du Dr REUL (un des créateurs du chien de berger Belge) datant de 1890
De même que « bon chien chasse de race », bon chien de berger garde instinctivement le troupeau de moutons qui lui est confié. Mais, il se peut qu'il y mette trop d'ardeur, qu'il inflige des châtiments peu en rapport avec la faute commise ou n'obéisse pas ou pas assez promptement soit à la voix soit au geste de son maître. Sans dressage, il contracte parfois aussi des habitudes mauvaises, telles que celle, d'aboyer à tout propos et hors de tout propos, de lacérer les oreilles des brebis, de les mordre profondément aux épaules, au nez, etc. Telles sont les raisons pour lesquelles il convient que tout chien de berger aille à l'école pour y faire son éducation on y compléter son instruction. Le meilleur maître d'école est, cela va sans dire, un chien de berger ayant Fail ses preuves. « On ne saurait donner trop de soins, écrit Magne, à dresser les chiens de berger, il les accoutumer à faire la sentinelle, à tenir le troupeau convenablement massé et surtout à ne pas effrayer les moutons et à ne pas les mordre.
« Pour les dresser, il faut les prendre jeunes et employer beaucoup
de persévérance, des caresses, des friandises et au besoin des
châtiments. Il faut surtout leur donner l'exemple d'un chien bien
dressé.
« Les premières fois qu'on les commet contre un mouton, il faut
être à côté d'eux et les surveiller attentivement; s'ils ont l'air de
vouloir mordre, on les saisit et on les corrige; on doit laisser pendre
une ficelle à leur cou afin de pouvoir les arrêter plus promptement.
« Au moyen de cette corde, on peut même les corriger, leur faire
sentir qu'ils ont mal fait.
« Si l'on a des chiens précieux à cause de leur activité et de leur
intelligence, mais qui ont malheureusement le défaut d'être un peu
méchants et de mordre les bêles à laine, il faut les museler ou mieux
leur briser les dents canines et même au besoin les incisives. »
Les Américains ont une manière spéciale de dresser leurs
chiens-bergers. Le célèbre Charles Darwin qui, à peine âgé de 25
ans, faisait partie d'une expédition scientifique de circumnavigation
autour du globe, à bord du navire le Beagle, va nous exposer en quoi elle
consiste: « Pendant mon séjour dans une estancia (c'est ainsi
qu'on nomme une ferme, en Amérique), à Montévidéo, dit le grand
observateur, j'éprouvai une agréable surprise en entendant raconter
et en suivant de près le mode d'éducation adopté pour les chiens de
berger du pays. Il est fort ordinaire de rencontrer là-bas d'immenses
troupeaux de moutons, qui, éloignés de dix kilomètres des
habitations, ne sont pas même accompagnés d'un berger-homme, et
dont la garde est confiée à un ou deux chiens. Je m'étonnai souvent
de l'attachement mutuel des chiens et des moutons; mais on peut
dire littéralement que cet attachement prend naissance à la mamelle.
« Le système d'éducation consiste à séparer de bonne heure le
jeune chien de sa mère, et à l'habituer au troupeau dont il
aura la garde future. Trois ou quatre fois par jour, on fait téter le
jeune animal à une brebis, puis on le dépose sur une couchette de
laine. Jamais on ne lui permet de communiquer avec un chien
étranger ou avec les autres membres de sa famille. On lui fait en
outre subir la castration, de sorte que, arrivé à l'âge adulte, il a à
peine le sentiment de l'existence de son espèce. Il résulte de cette
éducation que l'animal ne témoigne pas le moindre désir
d'abandonner le troupeau, et, de même qu'un chien défend son
maître, il prend la défense des moutons menacés. Lorsqu'on
s'approche d'un troupeau, le chien s'avance en aboyant, et, à ce
signalement tous les moutons se réunissent et s'abritent derrière lui.
Ces chiens savent aussi fort bien ramener le soir, à une certaine
heure, le troupeau à la bergerie.
« Leur plus grand défaut, tant qu'ils sont jeunes, est de vouloir
jouer avec les moutons, et de ne laisser aucun repos à celui de leurs
pauvres subordonnés qui devient l'objet de leur passe-temps.
« Chaque jour, le chien de berger, se rend à l'habitation de son
maître afin d'y prendre sa ration de viande, et aussitôt qu'on la lui a
donnée, il s'échappe, la queue entre les jambes, comme s'il venait de
commettre une action honteuse. Les autres chiens de la maison se
conduisent à l'égard de l'étranger qui vient prendre sa part du
gâteau de la façon la plus tyrannique; le moindre roquet le poursuit
et cherche à le mordre.
« Mais, du moment où il a rejoint son troupeau, il s'arrête, fait volteface,
se met à aboyer, et ses poursuivants décampent aussitôt. Les
chiens sauvages se hasardent rarement, et seulement quand ils sont
exaspérés par la faim, à attaquer les moutons gardés par des
bergers aussi fidèles. »
Un bon chien bien dressé, comme il s'en trouve beaucoup dans
les pays de grands troupeaux est plus utile, dit Magne, qu'un aide
humain: « il va, vient, fait le tour du troupeau, dont il accélère ou
ralentit la marche au moindre signe, à un son de voix, à un
mouvement de la main; il préserve les récoltes, fait avancer les
bêtes retardataires, tient le troupeau réuni, empêche les animaux de
sortir des chemins et des pâturages,
va chercher les moutons fuyards, ramène les vagabonds, etc.
« Les chiens mal dressés sont toujours nuisibles; ils mordent les
animaux, les pressent et occasionnent ainsi des accidents et des
avortements. Un mauvais chien nuit directement en pressant, en
mordant les animaux, et indirectement, en effrayant les bêtes, en
allant et venant brusquement et sans motif à travers le troupeau. »
D'après la manière dont ils accomplissent leur tâche; dit Félix
Villeroy (1), on distingue les chiens de berger en coureurs et en
pointeurs.« Le Coureur est un chien ardent qui, allant et revenant sur ses
pas, court continuellement sur le côté du troupeau. Si le troupeau
pâture sur un champ vide, près d'un autre champ qui lui est interdit,
le coureur ne cesse de parcourir la ligne que les bêtes ne peuvent
pas franchir. Et cependant il inspire peu de crainte aux bêtes, qui
souvent, immédiatement après qu'il est passé, vont brouter le fruit
défendu. Ces coureurs s'imposent une fatigue extraordinaire à
laquelle ils ne résistent pas longtemps, et ils ne comptent pars parmi
les bons chiens de berger.
« Le pointeur, au contraire, est couché aux pieds du berger ou
dans la raie de champ que les bêtes ne peuvent pas dépasser. Les
yeux à demi fermés, il a l'air de sommeiller. Mais, que le berger
prononce son nom et lui fasse un signe, ou qu'il voie une bête
dépasser la limite du champ abandonné au pâturage, alors il s'élance
comme une flèche et les délinquants sont promptement remis à
l'ordre. Ces chiens se font respecte sans tourmenter inutilement les
bêtes; ils se fatiguent beaucoup moins, ils durent plus longtemps et
ils sont certainement les meilleurs. Leur intelligence est vraiment
admirable, et souvent je m'étonne en voyant comme ils comprennent
un mot, un signe de la main, ou seulement de la tête, ou un coup de
sifflet du berger.
« Quand on voit le berger, calme et immobile, appuyé sur sa
houlette, ajoute Villeroy, et près de lui son chien la tête haute,
l'œil animé, l'oreille tendue, attendant un signe ou un mot prêt à
s'élancer pour obéir à l'ordre de son maître; alors on admire cet
empire de l'homme, qui a commencé par faire son esclave de l'animal
le plus intelligent, pour arriver par son aide à soumettre ou à
dompter les autres animaux. »
Dans les pays de culture avancée, là où les loups ont cessé de
vivre, la garde des troupeaux est utilement confiée à des chiens de
petite taille, à queue et oreilles longues, vifs et ardents au travail; ce
sont les meilleurs; ils servent uniquement à aider le berger dans la
conduite et la surveillance du troupeau. Mais là où les loups
abondent encore, - en Russie par exemple - des chiens de plus
grande taille, forts et courageux, à oreilles et queue amputées afin
de donner moins de prise à l'ennemi, sont indispensables. Ces chiens
sont souvent croisés avec le mâtin ou avec le chien des montagnes.
Il en a déjà été question dans ce travail.
« Pour que les chiens soient bons pour le loup, écrivait Magne, il
faut qu'étant jeunes, ils soient dressés par des individus de leur
espèce. Lorsqu'ils ont poursuivi deux ou trois fois le loup, qu'ils y ont
été encouragés par le berger, ils montrent ensuite beaucoup
d'ardeur à remplir leur mission; arrivent-ils dans un bois, ils en
parcourent tous les détours; entendent-ils crier au loup, ils se
rendent aussitôt du côté d'où vient la voix. »
Les chiennes sont en général meilleures que les mâles; ces
derniers sont quelquefois indulgents pour les louves.
Les chiens doivent être armés de colliers en métal ou en cuir
très épais et hérissés de pointes de fer, car le loup cherche à les
prendre au cou pour les étrangler. Il leur faut un harnais de
protection.
Qualités et défauts moraux de certains chiens de berger.
Nous sommes édifiés sur les précieuses marques d'intelligence
dont font preuve la plupart des chiens de berger. Chez quelques-uns
cependant des défauts peuvent exister et notamment celui de
mordre les brebis ou d'aboyer sans cesse.
Tout chien dont la dent pénètre volontiers sous la peau des
moutons doit être éloigné du troupeau; il y fait plus de tort que de
bien. Est surtout à craindre celui qui saisit les moutons à la gorge ou
dans les régions musculaires du membre antérieur et notamment à
l'avant-bras.
Si le chien se voit obligé de mordre pour se faire obéir, c'est
au-dessus du jarret de la bête que ses crocs doivent se faire sentir.
Pour empêcher les chiens de mordre ou leur faire passer cette
mauvaise habitude, on peut les museler ou employer une sorte de
bridon composé d'un cylindre de fer introduit dans la gueule en guise
de mors et maintenu par des courroies formant montants et têtière
pour se réunir au collier. Ce mors empêche nécessairement le chien
de serrer les mâchoires quand il veut mordre.
On voit de bons chiens attaquer les moutons aux oreilles, au
nez, aux pattes, mais sans quasi leur faire de mal.
Un grand défaut est de mordre dans la laine et de l'arracher par
touffes eu se laissant pendre à la toison. C'est une perte sèche pour
le propriétaire.
Tout chien trop vif, qui mène les brebis trop rudement provoque
des bousculades et des avortements consécutifs. Il devient
quasi impossible de conduire à bonne fin, dans le temps normal,
l'engraissement de moutons confiés à semblable gardien.
Aboyer a été considéré comme un défaut grave par le jury du
Scheep-Dog-Trial de Cureghem (premier concours sur troupeau en Belgique). Pour chaque éclat de voix, le
concurrent perdait de 5 à 10 points sur 1OO. Les avis sont
cependant partagés quant aux inconvénients que peut présenter
l'action d'aboyer dans le cas spécial qui nous occupe. Le Stock-Keeper avance
même que les Bob-tailed à voix très forte sont
recherchés. C'est un point essentiel pour eux que d'avoir une grosse
voix, car lorsqu'un troupeau important, de 1000 à 1500 moutons se
trouve dispersé, sur un signe du berger, le chien n'a qu'à faire
entendre sa voix trois ou quatre fois pour que tous les moutons se
rassemblent et évitent à l'animal la peine d'aller les chercher.
Dans d'autres milieux, les chiens sont invités à se taire
c'est, par exemple, lorsque le troupeau est en train de piller un
champ, du consentement du berger. Ainsi, les bergers qui, de
l'Allemagne, conduisaient autrefois à Paris des moutons gras,
recherchaient les chiens muets. Ces bergers ne faisaient certes pas
un trajet de 400 â 600 kilomètres sans laisser souvent brouter leurs
troupeaux sur des champs dont l'entrée ne leur était pas permise, et
ils ne voulaient pas que leur passage fut trahi par l'aboiement des
chiens. Le chien doit quelquefois aboyer, dit Villeroy, et il doit le faire
au commandement de son maître. Il est des chiens qui aboient
continuellement; les bêtes s'habituent à ces éclats de voix et n'y
prêtent plus la moindre attention. Quant aux aboyeurs eux-mêmes, ils
se fatiguent inutilement.
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