LA SOCIALISATION AUX CHIENS

La Socialisation aux chiens:

Rappel:
L'Ecole du chiot est une véritable maternelle pour nos chiens, le moyen de l'éveiller à la vie et au monde dans lequel il va devoir vivre, le moyen d'apprendre à communiquer avec les congénères et les humains.

Cette méthode ludique et éthologique est une véritable philosophie de l'apprentissage et des rapports qui doivent être instaurés entre l'homme et l'animal domestique, elle comprend obligatoirement plusieurs volets: Sociabilité, Manipulations, Résistance au stress, Hiérarchie, Education de base.

« Que l'on regarde un peu deux chiens qui se rencontrent par hasard et qui s'explorent l'un l'autre. On constatera qu'en quelques minutes, tout est fait. Nous savons immédiatement si l'autre a froid ou faim, s'il a été battu, s'il a une âme blanche, s'il fait la tête, s'il est méfiant. Le flair nous renseigne sur tout. Son âme est sans voile devient notre nez. »
Journal d'un chien Oskar PANIZZA

La Socialisation aux chiens
"Mon chien a peur des autres chiens", "Mon chien attaque les autres chiens", c'est entre autre, les plaintes que formulent les maîtres en arrivant dans un Club d'éducation. Nous allons voir que la socialisation aux congénères n'est pas innée, elle s'apprend.
D'autre part, elle peut se perdre, donc il faut l'entretenir.

- L'identification à l'espèce: 2ème semaine à 15 ème semaine environ

A sa naissance il ne sait pas qu'il est un chien!

Dans le ventre de sa mère il a été capable de ressentir les mouvements de celle-ci, ses émotions, la saveur des aliments qu'elle a ingurgité. A la naissance il perçoit son odeur, au bout de quelques jours les mamelles fabriquerons pour lui une odeur relaxante qu'on appelle une phéromone. Il sera secoué par les léchages puissants de celle-ci pour l'aider entre autre, à faire ses besoins, car les reflexes de miction et de défécation ne sont pas encore fonctionnels. Ce n'est qu'au moment où il va ouvrir les yeux (vers le 15 e jour) qu'il pourra voir faiblement le monde qui l'entoure et sa mère, on peut alors parler d'imprégnation ou de socialisation à son espèce.

Le phénomène de l'imprégnation a été décrit par Konrad LORENZ et Heinroth, deux précurseurs de l'Ethologie moderne dans leurs études sur les oiseaux nidifuges, en particulier l'oie sauvage. On met des œufs en couveuse et on attend l'éclosion. L'incubateur est placé dans l'obscurité, dès que les oisons sortent de l'œuf la lumière est allumée. Les oisons vont suivre l'expérimentateur comme s'il était leur mère.
En fait, Lorenz n'avait rien inventé et cette technique est utilisée depuis longtemps par les bergers. On peut lire dans l'ouvrage de Charles Darwin (1809-1882) sur son voyage autour du monde "Le système d'éducation consiste à séparer de bonne heure le jeune chien de sa mère, et à l'habituer au troupeau dont il aura la garde future. Trois ou quatre fois par jour, on fait téter le jeune animal à une brebis...".

Il est évident que dans les conditions naturelles c'est la mère qui remplit ce rôle, on peut dire que c'est un apprentissage obligatoire pour l'identification à l'espèce et la mémorisation des caractères de celle-ci, en particulier pour retenir les caractéristiques qui permettront la reproduction (empreinte sexuelle).

En cas d'absence de chiens pendant cette période (chiot orphelin élevé au biberon) l'identification va se faire avec l'espèce qui est la plus présente, s'il n'y a pas d'humain, il est possible que ce soit un chat par exemple, ou même comme cela a été prouvé expérimentalement un objet (jouet en peluche par exemple).
Plus tard ce chiot cherchera le contact avec cette autre espèce et fuira ou même agressera sa propre espèce.

On peut différencier les espèces nidicoles comme le chien ou l'humain où la maturation n'est pas terminée à la naissance et a besoin d'une assez longue période pour ce mettre en place, des espèces nidifuges (volailles ou cheval) chez qui l'identification est très précoce pour pouvoir suivre immédiatement la mère.

Cette socialisation va débuter par une phase d'attachement à la mère et se généraliser aux autres membres du groupe. Chez les loups on peut observer vers trois semaines, une prise en charge et une reconnaissance du louveteau par toute la meute. Il est recommandé aux éleveurs de laisser les chiots en contact avec des chiens adultes parfaitement équilibrés, en dehors de la mère ou, du père s'il est présent.

Il faut également mentionner qu'il est possible que cette identification à l'espèce soit uniquement ciblée à une race. Nous connaissons bien le polymorphisme de l'espèce canine (nous ne sommes pas chez les loups ou les caractéristiques sont générales), un éleveur de Whippets par exemple chez qui les chiots ne voyent que des Whippets. Si ces chiots ne partent de l'élevage qu'après la socialisation primaire (après 3 mois), lorsqu'ils seront confrontés à une race très différente de la leur, comme un Bobtail ou un Briard, ils vont en avoir peur ou l'agresser, ne le reconnaissant pas comme un chien.

Tu ne tueras pas!
C'est vers cinq semaines environ que le chiot va commencer à apprendre la morsure inhibée, une notion très importante lorsqu’on est un animal de meute afin de limiter les conflits et ne pas blesser les congénères dont on a besoin pour la survie du groupe.

C'est en jouant que le chiot va mordiller son frère ou sa sœur, qui va hurler ou contre-attaquer, ensuite ce sera à son tour d'être mordu et de crier afin de cesser d'avoir mal. Il va être nécessaire de renouveler cette expérience du combat "pour rire" jusqu'à ce que l'apprentissage soit bien en place, c'est ce que l'on fera à l'Ecole des Chiots.

Certains maîtres qui fréquentent l'Ecole sont outrés de voir que les moniteurs laissent les chiots se battent entre eux, on les entend couiner de manière désespérée. En fait c'est une expérience bénéfique et nécessaire pour l'avenir du chien si l'on veut qu'il apprenne à communiquer, donc à comprendre et à envoyer des messages corrects à ses congénères. il est donc important de laisser le chiot au moins jusqu'à 6 semaines avec sa fratrie et ensuite, de lui faire rencontrer des chiots et des chiens.

Le détachement et la hiérarchie alimentaire

L'attachement à la mère se réalise jusqu'à environ 3 semaines, ils ont besoin de cela pour vivre, vers 1 mois celle-ci va commencer à montrer les dents, à aboyer face à son chiot, à le secouer en l'attrapant. il est évident que cet évènement coïncide avec l'éruption des dents qui font mal pendant la tétée. le chiot va répondre en criant et en se mettant sur le dos, quelquefois en émettant quelques gouttes d'urine (rituel de soumission).

S'ils restent avec leur mère, on constate que vers 3 mois les mâles sont moins bien tolérés que les femelles, vers 7 mois ils seront agressés et rejetés (émission de phéromones sexuelles).

Les femelles risquent d'avoir un retard de chaleur qui est du à l'inhibition par les phéromones maternelles. Vers 3 semaines, comme chez les loups, la mère peut régurgiter de la nourriture. Elle peut les autoriser à venir manger dans sa propre gamelle, par contre vers 3 ou 4 mois les chiots sont rejetés sévèrement. on verra également s'instaurer vers 16 semaines une hiérarchie entre les chiots pour accéder à un aliment. c'est ce que l'on nomme la hiérarchisation alimentaire qui s'accompagne de postures d'apaisement (lécher, donner la patte) ou de postures de soumission (sur le dos).

Le détachement et la hiérarchisation sont des apprentissages essentiels que le maître (substitut de la mère) doit établir de manière claire avec son chiot, sinon c'est l'apparition de l'hyperattachement et des sociopathies.

A l'Ecole du chiot
La socialisation intraspécifique est introduite de manière toute naturelle en laissant les chiots de toutes races jouer entre eux. un jeu de rôle ou chacun devient à son tour chasseur ou proie, avec des combats entre chiots qui se terminent en alternance également par vainqueur ou vaincu.

Les moniteurs doivent veiller à équilibrer les groupes, qui se décomposent normalement avec un groupe de chiots âgés de 2 à 4 mois et un groupe de chiots âgés de 4 à 6 mois.

Selon le principe de base de la Méthode Naturelle chaque sujet est un individu à part entière et il faut quelquefois savoir improviser, par exemple un petit Yorkshire de 2 mois qui s'amuse avec un Saint-bernard de 4 mois peut se retrouver avec une fracture de la patte occasionnée au cours du jeu par la différence de poids. Le Saint-bernard doit être mis lors des séances de jeux actifs avec des chiots de sa catégorie.

Si on a affaire à un chiot particulièrement agressif vis-à-vis des congénères, mordant de manière acharnée jusqu'au sang, le moniteur peut intervenir de plusieurs façons afin de corriger ce trop mauvais penchant que l'on retrouve chez certains terriers génétiquement prédisposés pour la combativité.
Il faut pratiquer l'effet de surprise, par exemple en projetant à l'aide d'un pistolet à eau, un jet dans l'oreille du délinquant (il faut apprendre à viser). On peut prendre le récalcitrant dans les bras et le soulever brusquement.
On peut demander au maître de le soulever et de l'attacher à l'écart du groupe 5 à 10 minutes (isolement social). Il y a encore plusieurs possibilités de rectifier ces écarts de comportement mais à mon avis, la plus naturelle, c'est l'utilisation d'un chien adulte parfaitement équilibré avec un tempérament dominant. C'est ce que je nomme un chien "régulateur" dont le rôle est très simple. Il se promène au milieu des chiots et demeure indifférent aux invitations de jeu, par contre si un chiot tente de l'agresser ou démontre une forte agressivité sur un congénère, il intervient. En général il se contente d'attaquer, de projeter sur le dos, et de maintenir jusqu'à ce que l'énergumène se calme.
On peut utiliser pour ce rôle un chien de forte taille ou, tricher, comme je le fais en mettant ma chienne Berger des Pyrénées (âgée de 13 ans) dans le groupe.
Le petit Rott âgé de 5 mois qui "roule les mécaniques" et joue le tueur avec les autres chiots qu'il peut soumettre aisément va attaquer ce nouveau "chiot" de petite taille. Il va aussitôt recevoir une correction bien méritée qui va le rendre plus aimable à l'avenir avec les autres.

On peut également trouver dans une classe pour chiots, des sujets qui sont plus attirés par le contact avec les congénères que par les maîtres, ce qui est une excellente chose en ce qui concerne la sociabilité mais un handicap lorsqu'il s'agira de diriger son chien en présence d'autres chiens, en particulier pour le rappel.
Le moniteur doit instruire les maîtres pour qu'ils sachent utiliser correctement la motivation à l'aide de la friandise ou du jouet pour mobiliser leur chiot sur eux, pour cela on fait des marches au pied, des rappels collectifs, où ils présentent plus d'intérêt que les copains à quatre pattes qui travaillent à proximité.

En résumé
On a pour les chiots, une période d'identification à l'espèce par des jeux où il apprend à communiquer avec les congénères de toutes races, à reconnaître les caractéristiques du futur partenaire sexuel pour la reproduction, à associer le cri avec la douleur lors des jeux de combat pour que la morsure devienne inhibée et contrôlée (ces jeux de combat vont être remplacés autour de la 15e semaine par des mimiques, c'est la ritualisation).
Lors de la phase de hiérarchisation après 3 mois, il apprend la subordination aux parents et aux adultes, donc aux maîtres.
Attention, même si les éleveurs ont fait ce qu'il fallait pour établir la socialisation primaire, celle-ci doit être entretenue et renforcée en établissant des relations comportementales complexes dans les écoles des chiots, sinon il y a un risque de désocialisation.

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