LES PREMIERS MOIS DE LA VIE D’UN CHIOT

Les premiers mois de la vie d’un chiot sont décisifs pour son avenir. Quelques mois qui correspondent à plusieurs années de la vie de l’homme. Mais tout va si vite dans l’univers du chien... Il est essentiel que l’éleveur soit au fait des grandes étapes du développement psychomoteur du chiot qui serviront de cadre précis à des observations plus minutieuses telles qu'elles viennent lorsque, à force de soins attentifs, on arrive littéralement "dans la peau" de ces jeunes vies.

Se mettre dans la peau d’un chiot, imaginer ce qui peut se passer dans leur tête, voilà ce que va essayer de faire Joseph Ortega, notre spécialiste du comportement canin. Non sans avoir rassemblé une masse d’informations scientifiques qui sont une base solide à son propos.
Savoir ce qu’a vécu un chiot alors qu’on vient de l’acquérir à deux ou trois mois, c’est aussi très important à savoir pour tous les amis des chiens.
Qu’a-t-il appris, que peut-il comprendre ?
La vie du chiot ne commence pas au moment - vers quinze jours - où il ouvre des yeux bleu foncé, au regard incertain sur un monde encore flou. Deux semaines d’une vie qui n’est pas que végétative, mais déjà riche de sensations et de découvertes. Et au, delà même de la naissance, on sait de mieux en mieux que le chiot est sensible à l’environnement, directement on par l’intermédiaire de sa mère avec laquelle il vit sur le même rythme.

Avant donc de nous faire vivre les premières semaines de la vie d’un chiot. Joseph Ortéga fait la lumière sur la période la moins connue : du ventre de la mère à la naissance
Il a brusquement pris conscience qu’il existait, pas de sensation de corps, de pattes ou de queue, cette forme inconnue qui est lui-même flotte, flotte dans une bulle transparente faite de membranes amniotiques. Dans ce liquide tiède et riche d’une foule d’éléments nutritifs (sels minéraux, enzymes, vitamines, oligo-éléments, acides aminés, facteurs de croissance), il peut avaler et répéter, absorbant les calories. Il se sent merveilleusement bien, sans compter ce prolongement de soi-même que constitue le cordon ombilical, par lequel le sang de sa mère apporte eau, sels minéraux, vitamines, anticorps, hormones, glucides, lipides, protides...
La sensation d’un agrandissement dans d’autres directions, sous la forme des pattes : il peut se mouvoir dans l’espace liquide, pour se redresser à chaque changement de position de la bulle dans laquelle il est situé. Tension musculaire, recherche d’équilibre, tout cela devient bientôt assez aisé à effectuer, grâce à la maturation neuromusculaire et aux canaux semi-circulaires de l’oreille qui lui signalent une mauvaise position.
Des sons lui parviennent de l’extérieur sous la forme d’ondes. C’est ainsi qu’il se surprend un jour à écouter et comprendre les aboiements de sa mère ; sa mère comme une seconde bulle qui lui envoie les éléments de la vie par le cordon.
Maintenant, il prend des formes avec sa grosse tête et sa petite queue. Il s’intéresse de plus en plus à ce qui se passe à l’extérieur. C’est ainsi qu’il est surpris par les coups de feu, les sonnettes électriques. Les aboiements nerveux de sa mère qui le réveillent en sursaut. Il aime bien, par contre, la voix grave et douce du maître lorsqu’il parle tout en caressant la bulle extérieure qu’est le ventre de sa mère. Chaque pression de la main de l’homme lui procure un immense plaisir en le ballottant gentiment dans sa poche jusqu’à ce qu’il s’endorme. Il adore écouter la musique douce, dont les ondes apaisent ses angoisses du monde extérieur, et lorsque sa maman est calme et détendue, il l’est aussi. Si elle est effrayée, brutalisée, aussitôt des messages de peur lui parviennent el son petit cœur s’accélère an rythme de celui de sa mère ; il se recroqueville, crie, se contorsionne : il a mal partout dans ses muscles et dans sa tête.
À chaque instant, il s’ajuste à la neurophysiologie de sa mère et vit au même rythme qu’elle, avec, en plus, sa propre sensibilité à l’écoute du monde extérieur. La chaleur ou le froid, les compressions et les caresses ou les coups, les sons, les vibrations de toute sorte, la lumière trop vive, qui lui fait détourner la tête malgré ses paupières closes...
S’il avait à choisir, il réclamerait les caresses sur le ventre de sa mère, qui lui font accélérer son rythme cardiaque et augmenter le taux d’oxygène dans le sang, diminuer ses inquiétudes et le rendent plus fort pour affronter les excitations du monde extérieur. Depuis qu’il a pris du poids et qu’il occupe presque complètement sa bulle, il sait qu’il n’est pas seul dans le ventre de sa mère, et il a ressenti des coups de pattes de ses frères et sœurs, qui se trouvent autour de lui. Il a de plus en plus de mal à se mouvoir dans son petit univers, et il bouge de plus en plus pour tenter de se dégager de cette prison, tout en restant très attentif aux stimulations qui lui viennent de l’extérieur.

La naissance
Tout se contracte maintenant. Il subit un vrai massage sur tout le corps et il se réveille en sursaut pour être prêt à s’adapter aux circonstances. Sous l’influence des hormones hypophysaires, l’utérus de sa mère se convulse comme un véritable muscle puissant qu’il est.
Il ressent un craquement qui résonne dans sa tête et il sent le liquide qui l’entourait partir ; il glisse à sa suite, immédiatement enfermé par quelque chose d’humide, de chaud, de vivant. Il est alors dans un tunnel rigide où les os de son crâne, qui ne sont pas calcifiés, soudés, s’écrasent d’une manière élastique, prenant la forme du conduit. Par secousses, il se sent descendre, aspiré par le vide : tout son corps est comprimé, écrasé. Soudain, il tombe dans un autre univers, dans une bulle immense sans limite. Son thorax peut se dilater en aspirant quelque chose de léger et d’impalpable : l’air. Ses poumons se gorgent, pour la première fois, de ce nouvel élément vital, pendant que la langue chaude et douce de sa mère le débarrasse des mucosités qui encombrent son nez, et sa gueule. Les alvéoles pulmonaires, constituées de milliers de petits sacs, peuvent se remplir d’air, déclenchant la pompe de son cœur qui reçoit l’oxygène, cependant qu’une valve sépare le sang oxygéné du sang contenant le gaz carbonique. Pendant ce temps, maman s’est occupé de lui. Le nez froncé, les incisives découvertes, elle a léché, léché doucement et attiré dans sa gueule le sac amniotique, puis coupe net le cordon ombilical à la bonne longueur : ce cordon par lequel elle lui donnait de l’oxygène, alors qu’il était dans son ventre. Maintenant, il est capable de respirer tout seul, comme un grand, il peut même se permettre sous la pression de la langue, de pousser un cri. C’est ce même cri que lancent ses frères à leur naissance, qui bloque les instincts cannibales des mères, et il est arrivé que des mères sourdes ou menant au monde des petits qui ne crient pas, dévorent, après le cordon ombilical, l’anse intestinal qui le prolonge, jusqu’à éviscération...
Quel plaisir d’être caressé, massé sur tout le corps par la langue chaude qui aide ainsi à démarrer la fonction des poumons et à en coordonner les mouvements respiratoires, à évacuer l’intestin et à vider la vessie. C’est par elle également que sa mère s’imprègne de l’odeur caractéristique de chaque chiot, déclenchant les réflexes spécifiques pour le toilettage et les soins. Ces caresses sont indispensables pour la stimulation du métabolisme cérébral, elles lui permettent, ainsi qu’à ses frères et sœurs, d’avoir un développement plus rapide avec des facultés d’apprentissage très précoces.
Ses paupières sont fermées, mais il est tout de même sensible à la lumière vive.
Ses oreilles sont collées sur ses conduits auditifs et il n’entend que de vagues bourdonnements, sauf en cas de sons aigus, tout en étant capable de discerner les nuances dans l’intensité des ondes acoustiques.
Son nez, par contre, marche très bien et il sait déjà par cœur l’odeur de la langue de sa mère, ainsi que du poil chaud de son ventre, avec ses merveilleuses tétines (qui donnent un liquide sucré et parfumé) qu’il a vite appris à saisir entre la langue et le palais dans sa gueule pour aspirer. Ses premières aspirations lui ont offert du colostrum, qui est un lait très riche contenant des anticorps le protégeant des maladies. En attendant, il a provoqué chez lui une diarrhée laxative qui a nettoyé son appareil digestif du méconium.
Toujours dépendant de sa mère, il va néanmoins vivre sa propre vie.

Avant la naissance
On sait que la période de grossesse chez la chienne dure environ 63 jours.
Le milieu extérieur et les expériences vécues par la mère pendant cette période peuvent influencer le caractère des futurs chiots qui ne sont encore qu’au stade embryonnaire. Si la mère est victime d’un stress important, les fœtus le ressentent et peuvent en demeurer affectés toute leur vie. Ce message passe évidemment de manière chimique car il est hormonal par le cordon ombilical. Plus tard ces chiots seront toujours plus timides et plus émotifs, même si, à la naissance, on les fait élever par une autre mère qui n’a jamais eu de problème. Pour une chienne de travail on pourra la laisser poursuivre ses activités, du moins pendant le premier mois de gestation, cela ne peut être que bénéfique pour les chiots qui sont déjà baignés par les stimulations auxquelles ils seront confrontés plus tard.
On peut dire que les chiots vivent dans un univers aqueux liquide, qui permet d’amortir les chocs et d’atténuer les bruits extérieurs, mais qui ne les empêchent pas de ressentir déjà des émotions. La communication physiologique passe par le placenta qui sélectionne et filtre les éléments nécessaires à la nutrition et à la croissance.
La communication physique extrême peut être représentée par les caresses que fait le maître sur le ventre de la mère.
La communication par sympathie, ce sont les émotions qui sont communiquées aux fœtus.

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