LE CHIEN SANITAIRE – L’ancêtre du chien de catastrophe ou d’avalanche

Son rôle, rechercher les blessés et prévenir son maître afin qu'on leur porte secours. C'est en Egypte qu'ils sont utilisés pour la première fois afin de retrouver les blessés lors des batailles. A cette époque on pensait que le fait de lécher les plaies était bénéfique à leur guérison...

LE CHIEN SANITAIRE - L'ancêtre du chien de catastrophe ou d'avalanche

Son rôle, rechercher les blessés et prévenir son maître afin qu'on leur porte secours. C'est en Egypte qu'ils sont utilisés pour la première fois afin de retrouver les blessés lors des batailles. A cette époque on pensait que le fait de lécher les plaies était bénéfique à leur guérison...

Il faudra attendre le 18 ème siècle pour que le chien retrouve cet emploi très utile pour les humains. On peut affirmer sans se tromper que le chien sanitaire fut à l’origine de l’emploi du chien de guerre moderne !

Les pays précurseurs ont été, la Belgique en 1885, grâce au Professeur Reul de l'école vétérinaire de Cureghem et à deux journalistes, Van der Snick et Sodenkampf, qui mettent en place des démonstrations près d'Ostende. Le lieutenant Van de Putte qui constate l'efficacité de ces chiens de recherche va fonder "la Société des chiens Sanitaires".

Au même moment en Allemagne, dès la guerre de 1870, le chien sanitaire est en formation (le premier centre de dressage du chien de guerre moderne établit en Autriche Hongrie date de 1665) car on constate des pertes de vies humaines importantes (Guerre de 1870 : les Prussiens comptèrent 40741 tués et 4009 disparus, les Français 136450 tués et 11914 disparus). Les races utilisées étaient des chiens Dalmates, des Chiens loups de Poméranie, des Colleys écossais et surtout l’Airedale terrier, une grande gêne pour les allemands d’avoir recours à des chiens issus pour la plupart d’autres pays, ils créèrent donc une race de berger réunissant les qualités recherchées à partir de souches de Thuringe, de Franconie, du Wurtemberg.

C’est le capitaine Von Stephanitz (le véritable créateur du Berger Allemand), comprend que la race va perdre son emploi de berger et incite les utilisateurs de l'armée à l'utiliser à d'autre fins comme la quête des blessés dés 1880 (Dans son livre, qu'il publiera en 1921 sur le Berger Allemand, il dira que 4000 chiens sanitaires avaient été employés pendant le conflit et qu'ils avaient sauvé la vie à de nombreux soldats). La société du chien sanitaire voit le jour en 1893, en 1914 elle dispose d’environ 2000 chiens formés à la recherche.

En 1916, 1 600 chiens, sauvèrent 31 000 blessés. En 1890 ils sont intégrés au bataillon des chasseurs de la garde et on les retrouvera bientôt dans presque tous les régiments. Leur chenil de formation est situé à Oberdollendorf, il va être très visité et servira de modèle à plusieurs pays. L'ouvrage de référence sur le sujet ne sera publié qu'en 1933 à Berlin, par Konrad Most (tous les spécialistes du pistage connaisse sa fameuse croix pour l'entraînement) et Paul Böttger (cette fois c'est son harnais que l'on a retenu!).

En Suisse le cynologue et peintre animalier, J. Bungartz, va fonder en 1893 "l'Association pour les chiens sanitaires", et en 1903 va paraître le premier ouvrage sur le sujet "Guide pour le dressage et l'utilisation du chien sanitaire", sous la plume du capitaine A. Berdez, originaire de Berne.
Celui-ci va créer l'année suivante "l'association Suisse pour les chiens sanitaires et chiens de guerre" à Zurich. Le 14 août de cette même année eut lieu le premier examen pour chien de guerre et de police. On y voit surtout des Airedales et des Colleys mais c'est le Berger Allemand qui sera définitivement choisi pour ses qualités de nez et ses aptitudes.
La renommée de ces formations va dépasser les frontières et plusieurs pays viendront chercher des chiens dressés, à tel point que le conseil fédéral va interdire les exportations le 7 août 1914. Le premier cours pour conducteur de chien militaire va avoir lieu à Berne sous la direction du capitaine Studer. C'est le groupe soleurois du chien de berger qui organisera les premières épreuves publiques de chiens sanitaires.. Le colonel Henri Guisan parvient à généraliser le chien de l'armée en 1928 et un centre se créera à Bex (Valais) en 1934 pour le dressage.

Indie notre chienne Berger des pyrénées (décédée à 23 ans) à la découverte, le témoin dans la gueule

En France, le chien n'est pas une priorité pour l'armée. L’apparition du chien sanitaire date de 1895 en France (en 1870 en Allemagne), avec la création par le capitaine Tolet (il écrit des livres de dressage sous le pseudonyme de Pierre Saint-Laurent. Il partira se former en Allemagne). En 1895, Lepel Cointet, avec les concours du capitaine Tolet, du médecin inspecteur Février et des médecins-majors Casting et Bichelonne, reprirent l’initiative allemande et entraînèrent pour la première fois en France des chiens à la recherche de blessés. Une initiative privée aboutit, en 1906, à la création d’une « Société d’Etude », pour le dressage des chiens sanitaires.

Loustic 14-18
En 1908, cette société devint la Société Nationale du Chien Sanitaire, tenue par des bénévoles. Son objectif était de préparer les chiens à la recherche des blessés sur les champs de bataille. Elle obtint le parrainage des ministères de la Guerre, des Colonies et de l’Agriculture. Le 14 mars 1911 fut créé par le ministère de la guerre, à Avon-Fontainebleau, un premier chenil militaire de dressage de chiens sanitaires dirigé par le capitaine Tolet, subordonné au service de santé de la 7ème direction du ministère de la guerre.

En décembre 1915 fut enfin créé le «Service des Chiens de Guerre» (autres emplois que chien sanitaire : liaison, patrouille, etc.), rattaché à la direction de l’infanterie, sur la décision du ministre Millerand, suite à l’efficacité des chiens observés chez l‘ennemi et suite aux pressions de l’opinion et des troupes. On peut dire que c’est grâce à l’efficacité des chiens sanitaires que la France s’est dotée de chiens de guerre…
L’armée française a mobilisé au total 15000 chiens durant la guerre 1914-18 : près de 5300 furent portés disparus ou tués. On estime que les forces alliées utilisèrent 30000 chiens durant le conflit. Le 21 novembre 1918, une circulaire ministérielle démobilisait les chiens de guerre.

En France se sera la première utilisation reconnue du chien militaire jusqu’au conflit de 1914-18, malgré de nombreuses publications :

- Tactique et chien de guerre (1886) et Tactique et chien de guerre (1890) du lieutenant Jupin, appartenant au 32ème régiment de ligne, fut le premier à lancer l’idée d’une utilisation de chiens militaires par l’armée française en 1886. Il installa et fit fonctionner, sans crédits officiels, deux chenils militaires, l’un à Toul, l’autre à Verdun
- Etude sur la liaison par chiens de guerre du capitaine Lauth,
- Le chien estafette du lieutenant Vicard et du sergent Rhode en 1910, qui recensait les résultats obtenus par les chiens de liaison..

C'est un médecin-major, M. Rudler, qui forma le premier élève, son chien Stop qui était particulièrement doué. Il a raconté comment se passait l’éducation :

« Le chien étant près de moi, les yeux bandés et tenu en laisse par ma femme, qui a plus fait pour son dressage que moi-même, je m'éloignais en traînant les pieds à terre et me cachais. Stop pleurait. On lui découvrait les veux au commandement: « Cherche! Perdu! » Il n'avait plus qu'une idée, me retrouver, et courait à toute vitesse sur ma piste. Lorsqu'il m'avait rejoint, ma femme commandait: « Assis! A terre! » et le récompensait. Puis ma femme joua le rôle du blessé et moi, celui du dresseur; plus tard, Stop travailla sans difficulté avec un dresseur et un blessé quelconques. On augmenta les distances, on lui fit perdre la piste, ce qui l'habitua peu à peu à battre un terrain inconnu, sans savoir si un blessé y était ou non caché ».

Découverte et rapport d'un objet à la personne
Les chiens seront conduits par des infirmiers-instructeurs et des brancardiers. Dès le début du conflit l'armée dispose royalement de 250 chiens sanitaires dont plusieurs sauveront de nombreuses vies humaines, comme ce "Truc", un Beauceron qui récupérera 148 blessés.

Témoignage d’un brancardier sur les capacités des chiens qui les accompagnent :
« La bataille de la Meurthe dure une grande semaine. Nous pouvons, malgré certaines interdictions, effectuer trois ou quatre tournées, d'ailleurs très périlleuses, dans les bois des environs de St Benoit et trouver, chaque fois, deux ou trois blessés errants ou tombés, perdus en tout cas et exposés à s'égarer à nouveau dans les forêts extrêmement touffues. Nous pouvons, au cours d'une seule après-midi dans le secteur de Suippes, recueillir dans les bois plus de trente blessés, alors que les brancardiers, non accompagnés de chiens, rentrent bredouilles. ... ».

On va nommer ce chien spécialisé dans la recherche des blessés « chien brancardier », au début on l’équipe d’un collier à grelot et d’un surfait (sorte de gilet qu’on nomme également chabraque) qui contient un cordial, un paquet de pansement et une couverture avec une toile cirée (en Allemagne en ajoute une lanterne). Par la suite, afin d’éviter que l’ennemi ne leur tire dessus, il ne restera plus que la chabraque avec la croix dite de Genève. Le dressage commence par le rapport d’objet, puis le chien apprend à battre le terrain (quête croisée) sur des distances jusqu’à 200 m, ensuite à aboyer à la découverte (désignation) ou à rapporter le képi ou un objet appartenant au blessé, il peut également revenir vers son conducteur et aboyer avant de le conduire jusqu’au blessé (en Allemagne, à la découverte, il saisit le témoin qui pend sous son collier (bringsel) et revient vers son maître qui lui met la laisse et se laisse conduire).

Le rôle du chien sanitaire

C'est un travail de recherche sur terrain, découvert ou boisé, accidenté ou non.
Aujourd'hui on nomme cela le "questage" ou la "recherche en surface".

Le chien est équipé d'un harnais ou "chabraque" portant une croix afin que les soldats puissent l'identifier comme sauveteur, et en principe, ne lui tire pas dessus.

Il y a deux manières de rechercher: soit il est laissé libre de prendre toute initiative, soit il est dirigé pour battre le terrain, de gauche à droite, a partir d'une ligne médiane ou avance le conducteur, c'est la "quête croisée".

Lorsque le chien trouve le corps d'un blessé, il peut le signaler à son maître de deux façons différentes, soit il prend sur la personne un objet personnel (gant, mouchoir, casquette) et le rapporte à son maître brancardier qui le met aussitôt en laisse afin qu'il le conduise au blessé pour lui porter secours. Soit il a sous le collier un gros pendentif fait de cuir ou de corde tressée que l'on nomme "témoin" ou "bringsel" (Suisse, Allemagne), et dès qu'il découvre une personne il le prend dans la gueule et revient vers son conducteur, celui-ci le met en laisse et se fait conduire jusqu'au blessé.

Actuellement, seule la Suisse possède des chiens sanitaires qui participent à des compétitions sur un programme qui se rapproche des conditions réelles, avec exercices d'obéissance et recherche de personnes ou d'objets.

Témoignage « Mémoires d’un chien de guerre » par Yves Klotz - 1922

«Frère Jacques alors maintient Pluton au bord du parapet, en essayant de lui donner une vue sur l’endroit précis où se trouve le blessé ; il lui laisse entendre la plainte qui monte de là-bas et tout d’un coup, avec un ordre bref, il lâche le noble animal ! Pluton arrive tout droit au corps, il flaire un instant ! Horreur, à ce moment des balles partent de la tranchée ennemie ! ... Ils ont vu Pluton et ils tirent sur lui …Le sauveteur, superbe d’indifférence, ne s’émeut pas ; d’un seul coup de dent, il soulève violemment l’homme ; puis, après l’avoir tourné et retourné, il le saisit à l’épaule, et il le traîne, il le traîne et il approche de notre ligne avec son précieux fardeau ! Mais les balles sifflent toujours. Le soldat est atteint et Pluton est atteint lui aussi; il tombe sur le genou, une patte fracassée ! Ce n’est pas fini, il fait encore quelques mètres ! Il amène le blessé jusqu’au parapet ; puis il se dispose, tant bien que mal, à rentrer lui aussi, lorsqu’une balle, une dernière, l’atteint en plein dans la tête ! Pluton roule, les quatre pattes en l’air ! On le saisit à son tour, après avoir recueilli le soldat; mais le chien tombe lourdement au fond de la tranchée ... Il reste là, immobile, déjà raide, les mâchoires serrées, un filet de sang coulant sur ce beau sillon frontal tout blanc qu’il a entre les yeux. Le brave Pluton est mort, mais le blessé français est sauvé ! ... »

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