Les Molossoîdes vus par Marco Polo en 1275

Marco Polo était jeune, il n'avait que 17 ans lorsqu'il part avec son père Nicolo et son oncle Matteo pour les pays d'Orient. Un voyage qui va l'amener auprès de Koubilaï, le grand Khan, dans le grand empire Mongol fondé par Genghis Khan. Il va voir des choses merveilleuses ainsi que des animaux inconnus en Europe. En particulier des chiens énormes descendant des molosses du Tibet.
De retour chez lui, il va participer à la guerre entre la République de Venise et celle de Gênes. Il fut fait prisonnier et parmi ses compagnons de captivité il y avait un écrivain nommé Rusta qui mit par écrit ses aventures, c'est ainsi qu'est né "le livre de Marco Polo".
On connaît ce livre sous le titre de "Devisement (description) du Monde"

Marco Polo décrit ainsi ces chiens gigantesques d'Asie: " Ils ont des chiens grands comme des ânes, qui sont très bons pour prendre les bêtes sauvages, dont il y a beaucoup".
Certains ont voulu voir dans cette description une exagération romanesque, mais si on se réfère à l'histoire, il ne fut pas le seul à les avoir vu et ils existaient vraiment...

L'ancêtre, le Dogue du Tibet

C'est celui qui est considéré comme l'ancêtre des molosses, dogues et grands chiens de montagne. Il est souvent décrit comme énorme avec des poils bruns-noirs, les oreilles et la queue coupée. C'est le chien des nomades, il doit garder les troupeaux et la tente, il est à demi-sauvage...
Il faut préciser que cela se passe à environ 4000 mètres d'altitude et que seul un chien très puissant pourra résister aux conditions de vie (car il ne dort pas sous la tente mais dehors).
Selon la règle de Bergmann, l'apparition de certaines caractéristiques est la conséquence du milieu, la sélection naturelle et la sélection artificielle par l'homme ne conservant que les sujets qui réalisent l'adaptation.
Parmi ses ancêtres, on trouve au Tibet, la sous-espèce de loup "Canis lupus laniger" (Hogson 1847), ou dans l'himalaya "Canis lupus niger" (Sclater 1874). En Mongolie et dans les steppes de Mandchourie "Canis lupus Dorogostaiskii (Skalon 1936). Selon J. H. Huxley: "c'est très probablement par le moyen de petites mutations, en particulier sous forme de séries de stades allémorphes multiples, chacun étant ajusté en vue de la viabilité et de l'efficacité par combinaison et petites mutations nouvelles que s'est produit l'évolution progressive et adaptative".
Nous savons que la stature va en diminuant du Nord au Sud et en augmentant de l'Ouest vers l'Est. Le poids dépend de facteurs individuels liés au degré de mutation et au genre de vie, il y a diminution de poids avec l'élévation de la température moyenne annuelle.
Le degré de corpulence compare le poids à la stature (indice de Rhomer), il est lié à la répartition de la graisse sous-cutanée qui s'exprime par l'épaisseur du pli cutané.
Selon la région, il y a exagération de la surface corporelle ou diminution, chez les chiens de montagne il y a augmentation du rapport, poids-surface du corps.

Le mécanisme d'adaptation à l'altitude donne des globules rouges de plus petite taille mais en plus grand nombre, une vaste surface du corps permet la diffusion de l'oxygène et les échanges de ce gaz qui seront accélérés au niveau des poumons et des tissus pour faciliter la respiration.

Fo-Hi, en Chine va les décrire dans son livre d'élevage en 3468 avant notre ère.

Dans le Chou-King, le livre sacré écrit en 2188 avant notre ère, on parle d'un chien gigantesque dressé à l'attaque qui fut offert au prince Wong Wang.

On retrouve une représentation du dogue des Assyriens, du temps de Nabuchodonosor, au 7ème siècle avant notre ère, sur des terres cuites. Ils portent des noms évocateurs comme "travaille des mâchoires", "conquérant des ennemis", "effrayant des méchants". Leur description: "...Le corps musclé, puissant, long avec un dos droit et recouvert de poils ras. De petites oreilles pendant d'une tête placée sur un cou court. La peau de la face est plissée. La puissance de l'encolure et des pattes est remarquable, qui pourrait laisser croire que ce chien descend du lion."

Les Hyksos qui vont envahir l'Egypte au 18ème siècle avant notre ère apportent leur chien de combat et de guerre.

Plus tard Toutankhamon pour poursuivre les Nubiens sera assisté de molosses avec des colliers à pointes de fer.

Oppien écrira: "Les molosses des assyriens et des Sumériens étaient des combattants dont l'apanage était un courage martial. Ils attaquent les taureaux, s'élancent sur les sangliers impétueux et leur donnent le trépas. Pleins de confiance de leur propre force, ils ne redoutent pas même les lions leur souverains. Une taille énorme les fait ressembler à des collines élevées. Ils ont le museau aplati et de vastes sourcils qui, retombant sur les yeux, leur donne un air terrible. De brillantes prunelles étincellent dans leurs yeux enflammés. Leur corps robuste est revêtu d'un poil épais et présente un large dos. Ils ne sont pas légers à la course mais leur courage est extrême, leur force ne saurait s'exprimer et leur valeur indomptable ne redoute aucun danger."

Herodote, déclare en 550 avant notre ère, que Cyrus le Roi des Perses, reçut du roi d'Albanie, un énorme dogue en cadeau.

Alexandre le grand ( vainqueur de Darius Roi des Perses et conquérant de l'Asie mineure en 332) eut un cadeau similaire, comme le raconte Pline: " Lorsque Alexandre le grand voulut aller en Inde, le roi d'Albanie lui avait donné un chien de taille extraordinaire; ravi, Alexandre ordonna de lâcher des ours, des sangliers et finalement des daims, mais le chien reste couché sans faire le moindre mouvement. Cette paresse du grand animal agace tant le fier prince qu'il le fit abattre. Ceci fut rapporté au Roi par la rumeur. Il en fit envoyer un deuxième, en conseillant d'essayer cette fois non pas avec des animaux de taille réduite, mais avec un lion ou un éléphant. Alexandre n'hésita pas, et aussitôt vit un lion se soumettre. Puis il fit apporter un éléphant et put se régaler d'un spectacle dépassant tout. D'abord, le chien commença à aboyer fortement, tandis que toute sa fourrure se hérissa, il sauta au cou de l'animal et s'acharna sur lui, combattant tantôt d'un côté, tantôt de l'autre avec une grande habileté, attaquant et se repliant tour à tour lorsqu'il le fallait, jusqu'à ce que ses changements incessants fassent tituber l'éléphant, et sa chute fit trembler le sol violemment.".

On retrouve cette mention des chiens d'Albanie, appelée à l'époque l'Epire, elle était située au nord-ouest de la Grèce et son peuple s'appelait les Molosses, d'où le nom de Molosse d'Epire ou Epeirote. Selon Nemesien et Martial, les habitants de ce pays avait sélectionné un chien de grande taille: " Le chien de Molossie est un dogue au corps massif et imposant, le poil ras, une grosse tête au nez écrasé avec un stop (cassure du nez) marqué, des oreilles semi-dressées, un poitrail large, des pattes puissantes. On l'utilise pour la grade ou la chasse contre le gros gibier comme le sanglier ou l'ours.".

Au 7ème siècle avant notre ère, des chiens sont employés lors du siège de Mantinée par Agelisas.

Un siècle plus tard, Alyattes, roi des lydiens va les utiliser contre les Cimmeriens. Pline l'ancien écrira: "Les chiens, aprés le massacre des Cimbres, défendirent les familles de leurs maîtres qui étaient placées dans des chariots.".

Au 5 ème siècle avant notre ère, la ville de Corinthe se trouvait défendue par cinquante molosses, lors de l'attaque qu'elle subit les chiens la défendirent jusqu'à la mort, sauf l'un Soter (le sauveur) qui parvint à donner l'alerte.

On décrit ainsi ces chiens de guerre: " Ces cohortes, combattaient aux premiers rangs, sans se rebuter jamais; c'était des auxiliaires les plus fidèles, et qui ne coûtaient point de solde...".

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